- Quoi ? Mais Luaine, tu t'es encore battue ?!

La vieille femme avait lâché les fleurs qu'elle tenait dans ses mains sous l'effet de la surprise. Elle s'était approchée en titubant. Comme ça, elle avait eut l'air si fragile que Luaine eut l'impression qu'elle était faite de verre. Luaine s'était précipitée vers elle pour la soutenir. Avec une moue désinvolte, elle dit à sa grand-mère :

-Mais c'est parce que c'était un idiot ! Il disait que Maman se vendait la nuit. Alors j'ai frappé ! Qu'y a-t-il de mal à frapper un idiot ? Et puis, ce ne sont que deux trois égratignures, ne t'en fait pas !

En effet, Luaine n'avait rien de grave. Juste une griffure sur la joue, et quelques bleus disséminés un peu partout sur son corps. Mais c'était largement suffisant pour alarmer la vieille femme. Luaine anticipa le coup, et alla se blottir contre elle. Elle lui fit un gros calîn, avant de l'aider à s'asseoir.

- Maman est rentrée ?

-Non pas encore ...

Grand mère était gênée. Ca se voyait. C'est pour ça que Luaine ne chercha pas à en savoir plus. A cette époque là, elle avait 9 ans.

Luaine n'avait jamais su ce que faisait sa mère. Et d'ailleurs, elle ne la voyait presque jamais. C'était sa grand mère qui lui avait tout appris. Elle lui avait dit que c'était grâce à sa maman qu'elles pouvaient vivre comme ça. Du coup, Luaine n'en demandait pas plus. Ce genre de vie lui plaisait. Même grondée par la maîtresse, même insultée par des garçons idiots, elle savait qu'elle pouvait toujours rentrer chez elle, et voir le sourire de sa grand-mère. Le lendemain, sa grand-mère ne se réveilla pas pour lui souhaiter la bonne journée. Tant pis. Elle devait sûrement être trop fatiguée. Journée pas très banale. Une nouvelle élève est arrivée. Elle s'appelle Katy. Et bizarrement, elle sympathise directement avec Luaine. Celle-ci d'ailleurs n'a jamais été si heureuse. De vraies amies, elle n'en avait jamais vraiment eues. Rigoler avec sincérité, discuter de choses sans mentir... tant d'expériences nouvelles ! Mais déjà la cloche sonne, et il est temps de repartir. Luaine, désireuse de tout raconter à sa chère grand-mère, court tout le long du chemin pour rentrer chez elle. Bizarre. Personne n'est là pour l'accueillir. La maison est vide, et seul reste un petit bout de papier sur la table. Tremblante, Luaine s'en rapproche et lit avec difficulté :" Bonsoir ma chérie, je ne serais pas là ce soir, je suis allée envoyer mamie à la morgue. Ne t'inquiètes pas, je serais de retour demain. Courage. Ta maman qui t'aime très fort."

Morgue. Luaine se dépêche de chercher ce mot si étrange dans le dictionnaire. Trouvé. A peine Luaine lit elle le début de la définition, qu'il se met à pleuvoir. Chez elle aussi, une drôle de pluie tombe de ses yeux.

------------------- 4 ANS PLUS TARD --------------------------

-Dis Lulu, je peux dormir chez toi ce soir ?

Luaine avait acquiescé. Bien sûr que Katy pouvait dormir chez elle. D'ailleurs, ces temps-ci, Katy vient souvent à la maison. Ses parents sont en plein divorce. Et comme Luaine est toute seule chez elle le soir, ça ne devrait pas trop poser de problème. Luaine adorait Katy. Même plus. Elle l'aimait. Du vrai amour. Mais ça, elle n'osait vraiment pas le lui dire.

Depuis que sa grand-mère était morte, Luaine était devenue autonome. Elle savait se débrouiller seule. Pas grand chose avait changé finalement. C'était juste que maintenant, elle était seule. Elle avait continué à fréquenter Katy. Celle-ci était devenue en quelque sorte sa lumière. Enfin son seul échappatoire. Mais au fil du temps, Katy devint plus ... distante. Elle n'appelait plus Luaine, et refusait souvent de faire des sorties avec elle. Luaine ne mit pas longtemps à découvrir la raison de cet éloignement. Alors qu'elle se promenait dans la ville, elle vit Katy en train de .... bécoter son petit copain flambant neuf. Jalousie. Katy était à Luaine, et à personne d'autre. Alors Luaine se jeta sur les deux tourtereaux. Katy, outrée, demanda une explication. Luaine ne put que s'excuser en disant :"Je t'aime."

Rire, moquerie puis .... dégoût. Voilà comment fût le comportement de Katy vis à vis de Luaine. "Dégage ! Je veux plus te voir ! T'es dégueulasse !" Des mots qui déchirèrent et qui griffèrent le coeur de Luaine, qui jura de ne plus jamais tomber amoureuse d'une fille. Les jours étaient sombres. La rumeur s'était répandue à une vitesse folle, et Luaine n'avait plus d'amis. Et sa mère, qui n'était jamais là le soir ! Luaine aurait voulu parler à sa mère de tous ses problèmes. Mais elle n'y arrivait pas. Durant toutes ces années, leurs conversations étaient restées au stade de " Ah, il va pleuvoir aujourd'hui !" ou " Ca s'est bien passée à l'école ?". A bien y réfléchir, Luaine ne connaissait rien de sa mère. Bien sûr, elle savait quel "métier" elle faisait. Elle l'avait très bien compris. Et c'est bien pour ça qu'elle avait peur de lui parler. Alors, Luaine resta emmurée dans son silence. Elle s'entraîna à devenir désagréable, à faire fuir les gens. Comme ça, elle ne serait pas blessée par les autres. Par ceux qui essayeraient de la juger sans savoir.

Alors qu'elle allait rentrer au lycée, Luaine reçut une lettre. Une lettre aux écritures dorées. Après l'avoir lu et ouverte, elle alla supplier sa mère de la laisser y aller. Une école. Loin d'ici. C'était ça qu'il lui fallait, un changement d'air ! Sa mère ne mit pas longtemps à accepter. Pas de frais, voilà qui pourrait enfin la décharger d'un fardeau financier. Luaine s'inscrivit, mais au moment de son départ, sa mère tomba gravement malade. Enfin, cette maladie n'était pas une maladie passagère non. C'était une maladie incurable. Luaine resta auprès d'elle pendant 1 mois, 1 mois de perdu pour se faire de nouveaux compagnons.

Arrivée dans la Rainbow Academy, Luaine fut .... surprise. Une étrange atmosphère, des professeurs douteux ... et des rumeurs sur les ... vampires ? Peuh, être un vampire ou non, elle s'en fiche ! Du moment qu'elle change d'air, tout pour elle lui est acceptable. Par contre, la demoiselle ne livra pas son coeur aux élèves de sa classe. Elle fut plus de genre "loup solitaire", à essayer de prendre le moins de contact possible. Ce qui marcha plutôt bien. Luaine n'est pas du genre contrariante. Elle travaille bien, et ne pose pas de questions. Le fait que les professeurs soient bizarres ne la dérange pas, et elle fait tout pour rester elle même, quoi qu'il arrive.